Journal – août 2021

Mercredi 11

Randonnée sur la Dent de Broc

Jeudi 12

Randonnée sur la Dent du Chamois

Vendredi 13

Dans les gorges de la Jogne

Dimanche 15

Je m’allège. Après un tri drastique des livres (mais pas encore assez), c’est au tour des DVD, des vêtements, la cave. Aujourd’hui, je vends mon Braumeister, pas dans l’idée d’arrêter de brasser, mais d’aller vers un brassage plus à mon image, petit, expérimental. Ça fait bizarre de voir partir ce bijou avec lequel j’ai passé tellement de temps, et viens avec la tristesse une forme de liberté, de simplicité. Curieuse sensation que celle d’évoluer, impression parfois de se renier alors que c’est justement l’inverse.

Lundi 16

Mes mollets picotent alors que je remets un pantalon après trois semaines en short, je me déguise en revêtant un habit inadapté. Dans le train, en face de moi, un monsieur grisonnant, l’air bonnard, porte un vieux costume usé et repassé sans soin. J’aperçois un bracelet orange avec un pendentif argenté à son poignet, il jure totalement avec la tenue de travailleur. C’est peut-être son signe de protestation, sa manière de montrer qu’il ne se conforme pas entièrement aux codes vestimentaires, qu’il garde une touche de fantaisie. Je trouve ça beau et un peu triste.

Une discussion me revient, surprise il y a quelque temps entre deux jeunes hommes en costar : “C’est cool les costars gris, ça fait décontracté, c’est plus ambiance été”. Sept heures trente, dans la fraicheur matinale, ils suaient déjà sous leurs cols trop serrés par une cravate composant l’unique couleur de leur accoutrement.

Si j’étais cohérent et un peu plus courageux, c’est en bermuda que j’irai au travail dès qu’il fait plus de 25°C. Si on me faisait une remarque, une remontrance, je porterais une jupe le lendemain.

Vendredi 20

Inspiré par François Bon et ses formats courts, j’ai envie de tenter l’expérience. Plutôt que l’écrit comme à mon habitude, ou la vidéo qu’il propose, j’expérimente l’improvisation orale, en enregistrant rapidement un petit élément que je désirais partager dans ce journal.

Que fais-tu quand le souffle brûlant de la vie t’empêche de voir ?

Si c’est un peu gênant d’entendre sa propre voix, je m’amuse beaucoup. C’est spontané, il n’y a pas d’écriture, ça coule tout seul et l’intonation permet de se libérer de bien des contraintes narratives.

Samedi 21

En randonnée sur le Chasseron, nous nous faisons charger par une vache (pas celle de la photo). Prenant nos jambes à notre cou, elle nous suit quelques mètres avant de nous laisser déguerpir. Voilà une expérience plutôt impressionnante que celle de se retourner et de voir deux cornes précédées de 600kg de viande en colère nous foncer dessus. Même si nous passions à bonne distance, sur un sentier balisé, la présence de veaux explique certainement ce comportement. Et je me demande ce qu’aurait été la suite si nous n’avions pas couru. Note pour moi-même : continuer à me méfier de ces bestioles.

Lundi 23

Dans l’émission de Philosophie de R. Enthoven qui traite – surprise – de rapport à l’animal, une question fait tilt : les humains sont-ils les seuls êtres affectés par la beauté ?
Déjà, j’adore le choix du mot affecté, comme si la beauté transformait, qu’on la subit, sans retour possible… mais je m’éloigne… La réponse qui me vient immédiatement, et qui rejoint celle de l’intervenante, est non. Il n’y a qu’à voir les parures des oiseaux et d’autres animaux, leurs chants, le soin qu’ils mettent pour se rendre séduisants. Les explications généralement amenées, ne justifiant ces comportements que dans leur dimension utile et d’adaptation au milieux, cohabiterait avec l’esthétique, tout comme chez l’humain. Les animaux n’ont certainement pas le même sens du beau, ça ne veut pas dire qu’ils en sont dénués. Un développement arrive ensuite, découlant de notre méconnaissance des modes de communication des autres espèces, jusqu’où va notre ignorance ? Que savons-nous de ce que dit et transporte l’urine d’un chien, ou les phéromones des fourmis ?
L’idée que le chien, lors de sa promenade, lirait au pied du réverbère, du bout de sa truffe, les derniers vers inspirés pissotés par son voisin, ou que les fourmis, tout en s’organisant, s’enverraient des blagues par jets de phéromones bien sentis, est absolument délicieuse.

C’est toujours là que que la philosophie m’accroche, lorsqu’elle me permet de voir différemment, qu’elle me fait prendre conscience de perspectives que je n’avais pas envisagées, même ainsi sur des thématiques moins essentielles. Et plus que tout, elle m’amène à aimer le monde.


Je regarde des tutos photo. Les possibilités offertes par un engin bien maitrisé semblent infinies. Un petit flash et me voilà avec un fond noir en plein jour avec le rose bonbon d’une fleur d’hibiscus qui ressort en grande pompe.

Vendredi 27

Je me lance enfin dans Proust, intimidé tant par ces quatre mille pages mystérieuses que par mes attentes. Nombre d’auteurs en parlent comme d’une révélation, d’un tournant soit dans leur vie soit dans leur travail d’écriture. J’espère ne pas me faire trop d’illusions, mais un tel bousculement serait bienvenu.

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